Le 6 mars dernier, à l’occasion du Comité départemental Loup de la Haute-Savoie, la FDC 74 (Fédération Départementale des Chasseurs) a annoncé les résultats de son suivi du loup financé sur fonds publics (Conseil départemental, État…) à hauteur de 300 000 euros.
À ce jour, les chasseurs de Haute-Savoie n’ont publié aucun document qui expose la méthode utilisée ainsi que les arguments techniques et/ou scientifiques permettant de juger de la validité des résultats.
En admettant que l’on doive tenir pour incontestable l’estimation des chasseurs de 80 à 100 loups pour l’ensemble de la Haute-Savoie et des territoires limitrophes, ce chiffre n’a rien d’exceptionnel pour un département alpin où l’espèce se situe en phase de réinstallation.
Il y a un an, l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et son réseau de 160 correspondants de tous horizons (éleveurs, chasseurs, forestiers, naturalistes…) estimait qu’en Haute-Savoie les loups occupaient 13 territoires différents (dont 7 meutes), ce qui correspond à un minimum d’une soixantaine de loups pour 2022 (1).
À partir de l’estimation OFB de 2022 et compte tenu que les loups poursuivent leur retour en Haute-Savoie, il était attendu que l’estimation 2023 montre un accroissement naturel d’une vingtaine d’individus, soit au total et pour cette année, une estimation d’environ 80 loups présents en Haute-Savoie.
Il est possible que la débauche de moyens techniques déployés par les chasseurs depuis un an soit à l’origine de quelques loups supplémentaires détectés (2 à 3 meutes). Avec un investissement de 300 000 euros, chacun appréciera le rapport coût-avantage…
En se basant sur les départements alpins où la recolonisation est ancienne et compte tenu de la disponibilité de la Haute-Savoie en proies sauvages, FNE AURA et la LPO peuvent prédire « gratuitement » que le nombre de loups va continuer à augmenter pour se stabiliser dans les 5 prochaines années autour de 180 loups (ordre de grandeur), répartis en un peu plus d’une vingtaine de meutes.
FNE AURA et la LPO tiennent à rappeler 5 éléments majeurs :
- dans un département, les dommages sur les troupeaux domestiques ne sont pas corrélés au nombre de loups présents ;
- l’expérience montre que 5 loups présents dans un territoire où les troupeaux sont peu ou pas du tout protégés peuvent commettre plus de dommages que 5 fois plus de loups vivant au milieu de troupeaux protégés ;
- la protection des troupeaux est la seule méthode qui permet de contenir le niveau des dommages sur le long terme ;
- dans les départements alpins où la recolonisation est ancienne, le niveau des dommages est en voie de stabilisation autour de 1% de brebis tuées par les loups et ceci malgré la multiplication des meutes (2) ;
- cette stabilisation des dommages est le résultat du travail difficile d’une majorité d’éleveurs et de bergers qui protègent efficacement leurs troupeaux avec le légitime soutien financier de l’État et de l’Union européenne.
FNE AURA et la LPO renouvellent leur confiance dans le travail et les méthodes de l’OFB et de son réseau de bénévoles pour présenter une estimation objective et fiable des populations de loups vivant sur nos territoires.
(1) On obtient un ordre de grandeur de l’effectif des loups présents sur un département en multipliant le nombre de meutes connues par 8.
(2) Exemple : dans la Drôme, depuis 2015, le nombre de loups a été multiplié par 7 (estimation : 170 loups en 2022) et dans le même temps, le niveau des dommages 2021 était identique à celui de 2015 (300 brebis tuées).