Agriculture

Dans le contexte actuel de déclin drastique de la biodiversité des milieux agricoles, plus que jamais la LPO Auvergne-Rhône-Alpes s’engage pour mener des actions en faveur de ces espèces, dont plus de 30% des effectifs ont chuté depuis 30 ans.  

La méthode ? Travailler en lien étroit avec le monde agricole pour agir directement sur les espèces et les milieux fragiles. 

Agir pour le busard cendré, emblème des milieux agricoles

Le déclin des oiseaux des milieux agricoles

Depuis plus de 30 ans, la LPO et le Muséum d’Histoire Naturelles évaluent l’état des populations d’oiseaux communs nicheurs grâce au STOC : Suivi Temporel des Oiseaux Communs. Le constat principal de ce suivi est le déclin frappant des oiseaux des milieux agricoles avec une diminution moyenne d’un tiers des effectifs toutes espèces confondues (Fontaine et al., 2020). Parmi elles, certaines espèces montrent un déclin inquiétant :

  • Le Bruant jaune : -46,6% en AuRA (-58,5% en France)
  • Le Moineau friquet : -61% en AuRA (-72,7% en France)
  • Le Bruant ortolan a quant à lui disparu de la plupart des campagnes de notre région alors qu’il y était présent un peu partout autrefois.

Évolution des indicateurs par groupe de spécialisation, résultat du STOC de 1989 à 2019

Les causes de ce déclin sont en grande partie liées aux pratiques agricoles intensives :

  • Usage massif de produits phytosanitaires (herbicides, fongicides, insecticides, rodenticides…) polluant l’eau, les sols et les organismes ;
  • Haies et arbres détruits au profit de l’agrandissement des parcelles et de la rationalisation agricole, réduisant la capacité d’accueil des paysages ainsi que les déplacements (corridors biologiques) et donc les échanges inter-espèces ;
  • Destruction des zones humides, qui, bien qu’ayant ralenti, se poursuit encore et toujours, supprimant des zones refuges pour la faune sauvage ;
  • « Entretien » inadapté des haies, talus, fossés, réduisant leur capacité d’accueil.

Les oiseaux inféodés strictement aux milieux agricoles voient ainsi leur espace de reproduction, de chasse et de refuge se réduire comme peau de chagrin. Champs, haies, espaces ouverts, arbres isolés… Ce cocktail parfait n’est malheureusement plus aussi abondant et pour ces espèces, le bâti, les forêts ou les gîtes artificiels ne sont pas adaptés et ne sont donc malheureusement pas des « plans B » envisageables.

Un tarier des prés posé sur une gentiane
Tarier des prés - Violaine Gouilloux

À cela s’ajoute le changement climatique auquel certaines espèces peinent à s’adapter, notamment les oiseaux nichant dans les prairies, désormais fauchées trop tôt… C’est le cas du Tarier des prés, qui ne peut donc plus accomplir sa nidification.
D’autres groupes taxonomiques montrent aussi une évolution inquiétante. Une étude publiée en 2018 par une douzaine de chercheur Allemands et Hollandais atteste d’une disparition de presque 80% de la biomasse des insectes en Europe (Caspar et al., 2018).

Le déclin du monde paysan

Entre 1988 et 2016, plus de la moitié des fermes françaises a disparu (soit plus de 500 000). Cette dynamique se poursuit : entre 2013 et 2022, 161 000 chefs d’exploitation auront cessé leur activité, et seulement 71 000 personnes se seront installées.

Mais les espaces laissés par ces départs ne retournent généralement pas à la nature : ils sont repris par des exploitations agricoles existantes qui s’agrandissent, mécanisent et intensifient toujours plus leurs pratiques (drainages, engrais de synthèse, pesticides, plantes mutagènes, élevages concentrationnaires…) avec pour corollaire :

  • La destruction des habitats naturels
  • La déstructuration des sols,
  • La pollution de l’air, de l’eau,
  • Des impacts sur la santé humaine.

La surface moyenne des exploitations a ainsi augmenté de 34 ha en 25 ans. C’est un constat inquiétant pour les paysans, toujours plus isolés, l’alimentation des populations locales mais aussi l’environnement (qui dit ferme plus grande et moins de main d’œuvre dit en générale augmentation de la mécanisation, des intrants).

À l’heure ou la souveraineté alimentaire et la qualité de la nourriture sont au cœur des débats, le renouvellement de génération d’agriculteurs et d’agricultrices est l’un des plus gros défis auquel la France va devoir faire face ces prochaines décennies.

De plus, les effets du changement climatique entrainent des coûts s’élevant à plus de 500 millions d’euros en France (Conseil général de l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces ruraux).

L’ensemble de ces phénomènes créé de fortes inégalités sociales au sein même du monde agricole.

La LPO AuRA en action avec les agriculteurs et agricultrices

La LPO AURA travaille depuis plusieurs décennies aux côtés des agriculteurs pour les accompagner dans leur démarche de prise en compte de la biodiversité.

Accompagnement individuel, conseils, installation d’aménagements, protection d’espèces menacées… Les projets sont multiples et permettent aux agriculteurs d’évoluer dans leurs pratiques en étant accompagnés par des naturalistes professionnels.

Chaque année, ce sont plus de 400 agriculteurs et agricultrices qui travaillent avec la LPO en Auvergne Rhône-Alpes.

L’équipe de la LPO présente une forte compétence et une grande expérience en termes de capacités à réaliser des diagnostics sur les fermes, encadrer ou effectuer des chantiers nature, réaliser l’animation foncière, sensibiliser les agriculteurs et les habitants et valoriser les actions menées.

Elle bénéficie également d’un vaste réseau bénévole avec des référents locaux dans l’ensemble de la région. Par exemple, plus de 200 bénévoles participent régulièrement aux actions liées à l’agriculture sur l’ensemble de la région (inventaires naturalistes dans les fermes, chantiers de plantation de haie, création de mares, tenue de stands lors d’événements).

Depuis des décennies, une multitude de programmes en lien avec l’agriculture sont réalisés par la LPO Auvergne Rhône-Alpes. Ces programmes se décline en 3 grandes catégories :

La création d’infrastructures agroécologiques

Chantier de plantation de haie en Haute-Loire - Sébastien Nottellet

Les infrastructures agroécologiques (IAE) sont des habitats semi-naturels dans un agroécosystème qui ne reçoivent ni fertilisants ni pesticides et sont gérés de manière extensive (ex : haies, mares, murets en pierres sèches etc…).

La LPO AuRA encourage et accompagne le développement de ces IAE à travers plusieurs programmes :

  • Agri’mares: création et restauration de mares dans les milieux agricoles
  • IAE pour les espèces PNA : plantation de haies, d’arbres isolé, création de mares, semis de bandes enherbées en faveur des espèces bénéficiant d’un Plan National d’Action.
  • Une chouette un village : Installation de nichoir à rapaces nocturnes dans les villages
  • Chantiers de plantation de haie à échelle locale : Plantations et suivi de haies champêtres en région Auvergne Rhône-Alpes avec les partenaires locaux.
Création d'une mare prairiale en Isère - Jean-Baptiste Decotte

L’accompagnement des agriculteurs et agricultrices dans une meilleure intégration de la biodiversité

Formation sur la biodiversité des prairies dans le Cantal - Julien Curassier

Les agriculteurs et agricultrices sont les premiers acteurs de la protection de la biodiversité des milieux agricole. Il est donc primordial de les sensibiliser et de les accompagner à une meilleure prise en compte des espèces sur leur exploitation.

Consciente du rôle majeur des agriculteurs, la LPO AuRA accompagne plus de 500 fermes chaque année. Parmi ces actions d’accompagnement figurent :

  • ELEVE : Accompagnement des éleveurs avec les vétérinaires dans la gestion du parasitisme par l’utilisation raisonnée de traitements phytosanitaires afin de limiter l’impact sur les insectes coprophages.
  • Les formation MAEc : formation donnée aux agriculteur.ice.s ayant contractualisé a une mesure agro-environnementale.
  • Des Pies-grièches dans nos campagnes : rencontre et sensibilisation des éleveurs aux enjeux liées aux Pies-grièches.
  • Des diagnostics agroécologiques dans les fermes : réalisation d’inventaires et de préconisations de pratiques agricoles favorables à la biodiversité présente sur la ferme.
  • L’animation des groupes locaux Paysans de Nature  : l’objectif est de multiplier les espaces dédiés à la conservation des espèces sauvages, en contribuant à installer des paysans et paysannes acteurs de la défense de la vie sauvage en s’appuyant sur les politiques agricoles et environnementales existantes avec une gouvernance territoriale et en lien avec les habitantes et habitants des territoires.

La protection des espèces inféodées aux milieux agricoles

Pie-grièche à tête rousse © Romain Riols

Malgré la sensibilité des agriculteurs et agricultrices aux enjeux de conservation des oiseaux, le risque de destruction des nichées lors des travaux agricole reste important pour les espèces nichant sur les parcelles. La LPO suis donc depuis des décennies plusieurs espèces dont la nidification peut être mise en échec par l’activité agricole :

Des projets d'envergure

Grâce à nos nombreux partenaires, nos actions peuvent être menées sur l’ensemble du territoire et concerner un grand nombre de taxons.

Notamment dans le cadre du Fonds Vert, des projets concrets de protection d’espèces des milieux agricoles sont financés (cliquez sur les liens pour + d’infos) :

Témoignages d’agriculteurs et agricultrices

« Travailler avec la LPO est un partenariat de bon sens car en tant qu’agriculteur nous sommes proche de la nature, c’est nous qui la façonnons. Cela nous a donc paru naturel de travailler avec la LPO dans le cadre du programme ELEVE pour trouver les solutions les plus adaptées sur les traitements antiparasitaires sans nuire à la biodiversité de nos prairies. »

Jean Valère – Éleveur et producteur de Saint-Nectaire au GAEC des Violettes.

« Après avoir accueilli sur notre ferme deux stagiaires naturalistes en 2019 puis 2020 et l’équipe de la LPO, le diagnostic de la valeur écologique de notre espace a pu être dressé et a permis de proposer des mesures de gestion adéquates pour améliorer encore l’accueil de la biodiversité. »

Renaud, Maraicher au GAEC d’Artias

« Mon but est de produire de la nourriture sans détruire l’environnement, voire de l’améliorer. C’est pourquoi j’ai planté des haies et créé des mares pour mieux accueillir la biodiversité sur mes parcelles. »

Manon – Maraichère au Jardin du Muscardin

« Après avoir accueilli ces dernières années, une Nuit de la chouette et une Nuit de la Chauve-souris animées par la LPO, nous avons pu bénéficier d’un programme de pose de nichoirs sur la ferme. En 2020, nous avons reçu Anaïs (stagiaire en Master d’écologie) qui a réalisé un diagnostic de la biodiversité sur notre ferme. Nous avons pu alors découvrir une plante très rare à l’échelle du département, l’Hélianthème à Gouttes. Nous avons aussi découvert que nos haies étaient fréquentées par le Tarier pâtre ou encore la Pie-grièche écorcheur, mais le plus marquant reste l’observation de l’Œdicnème criard qui cohabite avec les moutons sur des parcours à la végétation rase. »

Serge et Claude – Polyculture élevage à la Ferme de Champier

« À la suite d’un atelier de construction de nichoirs, tenu par la LPO AuRA (délégation Drome-Ardèche), j’ai pris contact avec la LPO locale. Après avoir discuté de l’intérêt que je porte pour la biodiversité, c’est naturellement que le programme Des Terres et Des Ailes fut mis en place sur mon exploitation, avec l’installation de 4 nichoirs à chiroptères sur des poteaux à rapaces, de 3 nichoirs pour les mésanges, un tas de terre et une mare. Installée près d’un bosquet fraîchement planté, elle permettra également le développement d’amphibiens et d’insectes, et de garde manger aux chauves-souris. »

Rémi et Émile – Maraichers au GAEC Champ de main

« Pour moi, protéger la nature c’est aussi s’assurer au quotidien, d’un cadre de travail et de vie, agréable : le plaisir de croiser un lièvre, de saluer l’écureuil ou de jouir des chants printaniers… Plaisirs auxquels s’ajoutent les services écosystémiques rendus par cette faune sauvage, comme la consommation des rongeurs déprédateurs des cultures par les rapaces. J’ai donc pris contact avec la LPO locale (AuRA – délégation Drôme-Ardèche) pour qu’ils m’aident à développer davantage l’aménagement de la ferme pour y favoriser la biodiversité. Nous avons donc placé des nichoirs (Effraie des clochers, huppe fasciée, Faucon crécerelle et Chevêche d’Athéna). J’ai pour projet d’aller encore plus loin : installer des nichoirs à Mésanges et des gîtes à chauves-souris dans le verger de poires, creuser une mare à l’entrée de la ferme, construire des hôtels à insectes… »

Guillaume – agriculteur hyperactif (grandes cultures, arboriculture, maraîchage, élevage de porc, apiculture et populiculture) à la Ferme Bessey

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