Qui sont-ils ?

En Auvergne Rhône-Alpes, nous avons la grande chance de pouvoir observer 8 espèces de pics sur les 10 présentes en France : pic épeichette, pic épeiche, pic vert (ou pivert), pic noir, pic mar, pic cendré, pic tridactyle, et même le surprenant torcol fourmilier.

Ce sont tous des oiseaux diurnes, cavicoles et grimpeurs. Leur lieu de vie principal et privilégié, c’est l’arbre : ils y dorment, ils y mangent, ils y élèvent leurs jeunes… On les trouve donc naturellement en milieu forestier mais certaines espèces investissent également le bocage, les vergers et les parcs urbains.

À l’exception du torcol, migrateur au long cours, tous les pics sont sédentaires et très territoriaux, se laissant donc observer toute l’année, y compris pendant les hivers rigoureux où ils peuvent même se rapprocher des mangeoires.

Pic épeiche © Guillaume Allemand

Pic épeichette 

C’est le plus petit des pics. Il est de la taille d’un moineau et pèse l’équivalent de trois morceaux de sucre !

© René Diez

Pic vert ou pivert 

Comme le geai des chênes, c’est une sentinelle de la forêt, criant dès qu’un intrus se profile à l’horizon. Contrairement aux autres pics, il se nourrit essentiellement au sol, fouillant avec sa langue collante les tunnels des fourmilières.

© Françoise Ledru

Pic épeiche 

De la taille d’un merle, c’est probablement le plus commun des pics. Il fait partie des pics dits « bigarrés », avec le pic épeichette et le pic mar, se parant de rouge, de noir et de blanc.

© Jean Bisetti

Pic noir 

C’est le plus grand de nos pics puisqu’il mesure plus de 50 cm de long et 60 à 70 cm d’envergure. On repère assez facilement les arbres qu’il a travaillés à l’ampleur des cavités et écorçages !

© Jean Bisetti

Les pics mar, cendré et tridactyle, ainsi que le torcol fourmilier sont plus difficiles à observer : ils sont plus rares, plus discrets et cantonnés à des milieux particuliers, souvent plus éloignés des activités humaines.

Des concentrés de technologie…

Les pics sont parfaitement adaptés à la vie arboricole.

Parmi toutes les incroyables adaptations dont ils sont dotés, voici les plus importantes :

  • leurs pattes sont puissantes et pourvues de 4 doigts munis de longues griffes, comme des grappins. Contrairement aux autres oiseaux, deux doigts sont tournés vers l’avant et deux vers l’arrière, permettant ainsi une escalade des troncs efficace et en toute sécurité,
  • les plumes de la queue (rectrices) sont très rigides, servant ainsi de point d’appui en position verticale sur le tronc ou les branches,
  • leur bec est un mini ciseau à bois, tranchant et solide, dont l’usure est compensée par une vitesse de croissance plus importante que chez les autres oiseaux,
  • leur boîte crânienne est pourvue de tout un système de muscles puissants, d’os spongieux, de cartilages, qui permettent de protéger efficacement le cerveau, d’amortir et d’absorber les chocs subis par celui-ci quand les pics travaillent le bois,
  • enfin, ils possèdent une longue langue effilée, enroulée sur elle-même au repos, pourvue de soies et enduite d’une espèce de glu qui ne laisse pas beaucoup de chances aux insectes cachés derrière les écorces ou dans les fourmilières.
Pic épeiche © Jean-Philippe Guerin

Martèlement ou tambourinage ?

De chez vous ou lors d’une balade à proximité d’un bois, vous avez peut-être déjà entendu des coups sourds et répétés, plus ou moins rapides et qui résonnent. Il s’agit probablement d’un tambourinage de pic.

En effet, pour communiquer entre eux, marquer leur territoire et informer les autres pics que l’endroit est déjà pris, mâles et femelles tapent principalement les troncs d’arbres avec leur bec. Le choix du bois n’est pas fait au hasard : il faut un bois sec et dur qui fera caisse de résonance pour porter le son le plus fort et le plus loin possible. Le pic vert et le pic mar ne tambourinant que rarement, c’est plutôt les pics épeiche, épeichette et noir que l’ont entend habituellement.

Le tambourinage ne doit pas être confondu avec le martèlement. Celui-ci est émis quasiment toute l’année, lorsque le pic recherche de la nourriture ou creuse sa loge (son nid). Il s’agit alors d’un bruit plus irrégulier et bien moins puissant que le tambourinage. Chaque espèce de pic tambourine selon un rythme, une puissance et une durée spécifiques. Par exemple, le pic épeiche frappe en moyenne 6 à 12 coups en 0.6 secondes et peut tambouriner jusqu’à 600 fois par jour ! Le tambourinage du pic noir est beaucoup plus long et plus sonore, il peut porter jusqu’à un kilomètre.

Pic noir © René Diez

La loge, c’est le nom que l’on donne à la cavité creusée par les pics dans les arbres pour s’y abriter ou pour élever leurs jeunes au printemps. Plusieurs critères sont nécessaires pour choisir le bon arbre.

Le pic noir, par exemple, va choisir un arbre à la fois haut et épais, donc solide pour éviter qu’il ne tombe au premier coup de vent et que la nichée ne soit anéantie. L’accès ne devant pas être trop facile pour les prédateurs, il ne faut pas qu’il y ait de branche qui puisse servir d’escalier, ni de plante grimpante comme le lierre le long du tronc. L’écorce doit être la plus lisse possible et l’arbre ne doit pas être trop proche d’un autre. Enfin, il doit y avoir assez d’espace devant le trou d’envol de la loge pour que ce grand pic puisse circuler sans encombre.

À l’intérieur, il faut imaginer un 7 : un tunnel horizontal qui part du trou d’envol et qui se transforme en un conduit vertical plus ou moins profond qui aboutit au nid lui-même.

Entre 15 jours et 1 mois sont nécessaires à un couple de pics pour creuser une loge !

Pic noir creusant sa loge © Joël vial

Oups…

En général, les pics commencent à tambouriner en fin d’hiver, jusqu’en mars-avril, au moment de la période de reproduction, où l’activité est maximale.

Mais il arrive également que les pics tambourinent ou martèlent à d’autres périodes de l’année, sur des supports atypiques. En effet, les pics s’attaquent parfois aux bardages en bois sous les avancées de toit, aux façades ou aux volets en bois… et parfois même à des poteaux téléphoniques ou des tubes métalliques !

  • Les volets en bois sont souvent assimilés par les pics à une caisse de résonance très efficace.
  • En plus de leur résonance, les bardages offrent aussi une cavité idéale pour passer l’hiver ou nicher au printemps.
  • L’isolation thermique par l’extérieur (ITE) réalisée en polystyrène et recouverte de crépi est très appréciée des pics, notamment des jeunes de l’année peu expérimentés et en quête d’un territoire. Ce type d’isolation ressemble à s’y méprendre à du bois vermoulu recouvert d’une écorce rugueuse. Les pics y trouveraient là un support tendre à creuser, pour s’y abriter ou y chasser de potentiels insectes xylophages à se mettre dans le bec !

Malheureusement, il n’existe pas de solution miracle quant aux problématiques liées aux pics. En effet, selon la période de l’année, l’âge de l’individu concerné, le milieu environnant, etc., les situations peuvent être complexes et variées, et donc les solutions adaptées, différentes d’un cas à l’autre. Une solution peut fonctionner à un moment précis, un endroit donné et avec un pic particulier, et pas du tout dans une autre situation qui parait pourtant similaire !

Besoin d’arbres sains et d’arbres morts

La plus grande menace qui pèse sur les pics, comme sur beaucoup d’autres espèces, est la diminution de leurs habitats naturels, ces espèces étant très dépendantes des pratiques forestières tout au long de l’année : coupes forestières au printemps ou sur des surfaces trop importantes, homogénéisation des peuplements, morcellement des habitats favorables, élimination systématique des arbres morts ou des vieux arbres dans les parcs…

Afin de préserver les populations de pics mais aussi nos façades, bardages et volets, il est donc indispensable de conserver un maximum de milieux naturels favorables aux pics, dont de grands arbres morts sur pieds et sénescents.

En effet, environ un tiers des habitants de la forêt dépend directement de la présence de très vieux arbres ou de bois mort. Les trous creusés par les pics intéressent de nombreux locataires : écureuils, mésanges, chauves-souris, chouettes, abeilles…

Chaque espèce a ses préférences quant à la taille de la cavité, sa profondeur, sa hauteur ou son orientation. Heureusement, les pics offrent toutes les variantes possibles, des petits trous de l’épeichette aux grandes chambres du pic noir.

Traces de pic noir © René Diez

Depuis quelques années, le pic mar semble être en expansion dans notre région. Facilement confondable visuellement avec le pic épeiche pour les naturalistes peu expérimentés, il est cependant beaucoup plus discret, ce qui ne facilite pas son observation. Le risque de confusion est particulièrement grand avec les jeunes pics épeiches qui portent aussi une calotte rouge sur la tête à leur sortie du nid.

Sa distribution est irrégulière, offrant localement des densités élevées, et est très liée à la gestion forestière. En effet, le vieillissement des forêts et la conservation des gros fûts sur pied est particulièrement favorable à ce pic bigarré.


Ce projet a reçu un soutien financier de la DREAL Auvergne-Rhône-Alpes.