Le projet
Le 30 septembre 2023, la LPO a participé à une journée de mobilisation et d’information contre la construction du barrage de Saint-Romain-de-Jalionas (38).
En effet, la CNR (Compagnie Nationale du Rhône) porte un projet de construction d’un nouvel aménagement hydroélectrique sur le Rhône, entre l’Isère et l’Ain.
Ce projet s’inscrit sur l’une des dernières zones naturelles du Rhône, là où le fleuve a conservé son plein débit dans son lit historique.
Le bon état écologique du fleuve n’est avéré que sur 20 % de son étendue. Aujourd’hui, sur les 545 km du linéaire du fleuve en France, seulement 25 km sont encore indemnes d’aménagements physiques, soit moins de 5 % !
Les associations LPO AuRA, FNE AuRA, Lo Parvi et l’association régionale de pêche estiment qu’il s’agit d’un mauvais projet, économiquement dispendieux et au rapport efficacité énergétique/impact environnemental catastrophique, alors que d’autres solutions existent.
Conformément à son engagement, la LPO est défavorable au développement d’énergies renouvelables générant des impacts négatifs importants pour la biodiversité. C’est le cas pour le barrage de Saint-Romain-de-Jalionas qui doit être implanté dans un espace à fort enjeu biodiversité.
Dans cette perspective hélas funeste, la LPO a tenu un stand lors de la journée du 30 septembre 2023 et a développé son argumentaire devant un public venu nombreux tout au long de cette journée. Les échanges avec notamment des habitants des communes avoisinantes mais aussi des militants engagés a permis de partager notre position.
En effet nous pensons, comme toutes les associations et les élus présents, que ce projet de barrage outre dispendieux par rapport au résultat obtenu, ne tient pas compte de l’accélération des changements climatiques (ou qu’il en tient compte a minima).
Il est possible d’obtenir de meilleurs résultats grâce à des solutions alternatives (solaire par exemple).
Considérer les enjeux climatiques
Il est essentiel de prendre en compte les changements climatiques en particulier concernant la production d’électricité hydroélectrique.
Par exemple : en 2022 dans la zone sud de la région PACA, à cause du déficit hydraulique, la production électrique des barrages a été réduite de 60 %. RTE (gestionnaire du réseau de transport d’électricité Français) reconnaît d’ailleurs dans une étude prospective de 2021 qu’en période de sécheresse (de plus en plus habituelles, notamment dans nos régions) la production hydraulique pourrait chuter de 65 % dans certaines régions.
De plus, le décalage des pluies et de la fonte de neige (sa raréfaction même) occasionne des modifications sur le remplissage des bassins et donc des modifications sur les lâchés d’eau et des conséquences sur la faune (faune aquatique, oiseaux, etc.).
Les marnages mais surtout les lâchés d’eau qui seront réalisés affecteront durablement les zones de nidification, les pontes seront détruites, les habitats (zones de graviers végétalisés) seront également affectés et risquent d’être colonisés par des espèces invasives mieux adaptées à ces nouveaux milieux.
Autre rappel, un barrage demande des tonnes d’acier, de ciment, béton, et le transport de ces matières.
On estime à 14 tonnes de matière première par Gwh produit.
Mais surtout, il impacte la dernière zone sauvage de ce fleuve Rhône hélas devenu un simple moyen de production (barrages, centrales nucléaires, industries chimiques, enrochement et bétonnage des berges, navigation, etc.).
À tel point que dans certains endroits, des associations tentent aujourd’hui de récréer des zones propices à la biodiversité ; réparer les erreurs du passé, bien que cela s’avère strictement inefficace.
Une biodiversité déjà fragile
N’oublions pas que la première cause de perte de la biodiversité est la destruction des habitats naturels.
La biodiversité est cruellement impactée : en métropole, on compte un obstacle tous les 4 km de cours d’eau selon OFB.
17 % des espèces de faune et de flore sont menacées ou éteintes en France, et leur risque d’extinction a augmenté de 14 % en moins de 10 ans : disparition de 24 % des oiseaux entre 1989 et 2021, de 36 % des oiseaux des milieux agricoles et de 43 % des espèces de chauves-souris entre 2006 et 2021. 66 % des papillons de jour ont disparu dans au moins un département (effondrement massif des populations d’insectes), etc.
Sur cette portion du Rhône, il existe des zones d’hivernage pour les oiseaux d’eau. 46 espèces hivernantes liées plus ou moins étroitement aux milieux aquatiques sont observées chaque année.
Les oiseaux nicheurs (142 espèces d’oiseaux observées) seront aussi affectés du fait de la destruction des berges et des ripisylves, zones particulièrement propices pour ces espèces.
Les oiseaux paludicoles composés d’espèces nichant dans les roselières (Rousserolle effarvatte, Rousserolle turdoïde, Nette rousse, Râle d’eau…) ne pourront plus trouver de lieux favorables à leur nidification en raison des contraintes de la gestion du fleuve par ce nouveau barrage ; foulques et anatidés étant très sensibles aux fluctuations des niveaux d’eau.
12 espèces d’amphibiens protégés sont signalées dans les données : Crapaud calamite, Alyte accoucheur, Crapaud commun ou épineux, Grenouille agile, rieuse, rousse, verte, Rainette verte, Salamandre tachetée, Sonneur à ventre jaune, Triton alpestre et palmé.
Des espèces avec des exigences variées pourront également subir les modifications causées par l’infrastructure en amont et en aval.
9 espèces de reptiles sont présentes dont 8 sont protégées. Elles auront également à subir les changements avec le risque d’installation d’espèces exotiques moins sensibles aux variations.
Enfin, les mammifères, castors et loutres, ont besoin de la continuité hydraulique afin de maintenir une population viable par le brassage des populations, qui sera rendus encore plus difficile par la construction du barrage et les marnages d’eau.
L’engagement de la LPO AuRA
C’est pour toutes ces raisons que la LPO Auvergne Rhône-Alpes s’oppose à ce projet de barrage parce que des solutions alternatives existent et que nous considérons que sauver et protéger la dernière zone sauvage du Rhône, cette niche de biodiversité, est un devoir pour la vie.
Alors que la concertation préalable du projet Rhônergia devrait se tenir du 1er décembre 2023 au 29 février 2024, il est important de nous mobiliser.
Si cette mobilisation vous intéresse et que vous désirez recevoir des informations, n’hésitez pas à nous en faire part : .
Merci pour votre engagement et votre mobilisation à nos côtés.