Les Sternes pierregarin et naine sont les oiseaux emblématiques de l’Allier mais également de la Loire.
Chaque année, elles effectuent un long vol à travers l’Afrique et l’Europe pour venir se reproduire dans le Val d’Allier. De fin mars à fin septembre, on peut ainsi admirer leur vol délicat et leurs pêches spectaculaires en bord d’Allier. Pendant cette période, elles s’installent en colonie et creusent leurs nids à même le sol, sur les bancs de sable de la rivière Allier.
À la suite de différentes études menées, nous connaissons désormais les raisons pour lesquelles les sternes privilégient les îlots situés sous le pont Régemortes à Moulins, où, depuis 1999, s’installe chaque année une colonie représentant en moyenne entre un quart et la moitié de la population de ces oiseaux nichant sur la rivière Allier : la ressource alimentaire y est très abondante et très facile à pêcher et les îlots correspondent parfaitement au biotope nécessaire aux oiseaux.
Pourtant, nombre d’îlots existent sur la rivière Allier dont certains étaient encore très récemment utilisés par les oiseaux. Pourquoi ne sont-ils plus privilégiés par les sternes ? Beaucoup de questions se posent.
Agir pour protéger les Sternes du Val d’Allier
En juin 2023, les bénévoles de Moulins ont parcouru l’Allier de Moulins au Veurdre en canoë à la recherche de traces de nidification. Tous les îlots furent passés au « peigne fin » comme l’on dit ! Des sternes, oui il y en a. Elles circulent, elles pêchent, mais pas de nidification sur ces îles.
Le constat semble clair : les iles sont trop végétalisées, il n’y a plus de bancs de sable libres de toute végétation. Les besoins des sternes en termes d’habitat ne sont plus présents.
Parallèlement, les canoës ont tendance à stationner sur les îles car il n’existe pas d’autres endroits où accoster pour se reposer après une journée de navigation. D’où des dérangements préjudiciables aux oiseaux. En effet, les sternes sont très sensibles au dérangement. La durée de vie d’un œuf qui n’est pas couvé se situe entre 5 à 7 minutes, au-delà, l’œuf est perdu. Et comme elles pondent à même le sol, dans le gravier nu, et que leurs œufs se confondent avec ce dernier, on observe également des œufs piétinés. Souvent, elles ne réussissent pas à mener à bien leur seule nichée annuelle.
La dynamique de la rivière est-elle impactée par l’évolution du climat ? On peut le penser.
Oui l’Allier, lorsqu’elle ne se heurte pas à des enrochements, méandre et recoupe l’un entraînant la naissance d’une boire, érodant une berge, créant selon le substrat érodé des falaises friables propices à la nidification d’autres espèces patrimoniales (Hirondelle de rivage, Guêpiers d’Europe). En ce sens, la rivière a toujours sa dynamique.
Mais où sont passées les grandes crues d’hiver ou celles du tout début du printemps nécessaires à la vie d’un cours d’eau ? Les crues sont pourtant le fonctionnement naturel pour les rivières. Il n’y a plus les crues d’hiver morphogènes permettant de régénérer les bancs de sable favorables à l’installation des sternes. Aujourd’hui, on a totalement oublié l’utilité des crues.
Conséquence : la végétation envahit les bancs de sable, pousse à foison, et le renouvellement, le nettoyage des bancs de sable ne peuvent plus s’accomplir.
En conclusion, à défaut de financements publics ou de prise en main de ce sujet par les pouvoirs publics, il restera aux associations protectrices de la biodiversité à trouver des systèmes pour favoriser la nidification et la reproduction de ces magnifiques oiseaux et surtout surveiller et maintenir les populations là où elles se sont déjà installées.
Sylvie Lovaty, coordinateur Auvergne Sternes et Laridés