Le 28 mars 2024, nous sommes quatre jeunes en service-civique ou en alternance à la LPO Drôme-Ardèche à nous être rendues sur un site exceptionnel et atypique de notre région, dans les hauteurs de Vallon-Pont-d’Arc, zone d’équarrissage de la LPO Drôme-Ardèche, endroit secret et magique de notre région duquel on peut observer les vautours avec une proximité inouïe. Gérée par les naturalistes en charge de l’étude des vautours, cette placette a pour but de fixer les populations de vautours en leur mettant à disposition une ressource de nourriture écartée de l’environnement par les normes sanitaires. L’objectif principal est le maintien et le développement d’une espèce classée ”en grave danger” sur la liste rouge régionale et revenue depuis vingt ans en Ardèche méridionale : le Vautour percnoptère.

Le suivi s’effectue par observation directe ainsi qu’à l’aide de pièges photos.

Placette d’équarrissage Basse-Ardèche ©Joaline Baudouin
Observation en Basse-Ardèche ©Joaline Baudouin

C’est donc avec une grande hâte que nous avons rejoint ce jour-là Florian Veau, un naturaliste de la LPO chargé de l’étude des vautours en Ardèche. Après un trajet qui nous a bien secoués sur les chemins de la forêt sud-ardéchoise, nous sommes arrivés sur le lieu-dit où un Vautour fauve majestueux nous attendait. Une belle première surprise !

Vautour percnoptère d’Ardèche photographié à la longue-vue ©Joaline BAUDOUIN
Vautour percnoptère
©Joaline BAUDOUIN

Après le dépôt des charognes par Florian, nous avons pu observer de nombreux vautours arriver sur la zone, se presser sur les rochers et collines environnantes, attendant notre départ pour se réserver un morceau de choix. Certains étaient à une vingtaine de mètre de nous, rendant l’observation aux jumelles et à la longuevue plus que confortable. Le plus téméraire était un Vautour percnoptère adulte, posté à la pointe d’un rocher à une quinzaine de mètres de nous à peine. Un véritable régal pour les yeux ! De nombreux vautours fauves sont également arrivés, pour la plupart par couple, observant avec envie leur prochain repas, ce qui a donné lieu à de beaux clichés qui, nous l’espérons, vous transmettrons un peu de notre émerveillement à ce moment-là !

Vautour fauve ©Joaline BAUDOUIN
Couple de Vautours fauves ©Joaline BAUDOUIN

Après une bonne heure à les observer arrivant en nombre et à écouter les explications détaillées de Florian sur les espèces et leurs spécificités, nous nous sommes reculés derrière la grille de la placette d’équarrissage. Une trentaine de secondes plus tard, ce furent des dizaines de vautours qui se précipitèrent sur cette dernière, se poussant à grands coup d’ailes pour les plus pressés. A vingt mètres de nous, ils étaient au final une quarantaine de vautours fauves à dépecer les charognes comme si notre présence ne les gênait pas le moins du monde. Quelques grands corbeaux étaient également de la partie, attendant patiemment que les vautours leurs lèguent la place. Les percnoptères, quant à eux, plus discrets, étaient en retrait.

Vautour fauve ©Joaline Baudouin
Vautour fauve ©Joaline Baudouin

Par la suite, durant notre pause déjeuner, nous avons pu apercevoir un vol d’une dizaine de vautours fauves, mais également un magnifique vautour moine (reconnaissable à sa silhouette plus « rectangulaire ») et un milan noir prendre un courant ascendant juste au-dessus de nous.

Vol de Vautours ©Joaline Baudouin
Sortie Vautours ©Joaline Baudouin

C’est durant ce moment que, un peu plus au calme, nous avons pu en apprendre plus sur le travail de Florian, naturaliste passionné par les vautours qui dédie sa vie (et l’hygiène de son 4×4 😉) à la protection et à la réintégration de ces espèces emblématiques. Sa mission consiste, en plus de déposer sur plusieurs placettes d’équarrissage des cadavres d’animaux récupérés chez des éleveurs, à participer activement à la restauration des populations de vautours en Ardèche, notamment le vautour percnoptère et le gypaète barbu. En effet, le vautour percnoptère avait pratiquement disparu de nos régions dans les années 1960. Prise en charge par des protecteurs des oiseaux depuis lors, l’espèce se reconstitue lentement mais sûrement !

Florian Veau, naturaliste LPO ©Joaline Baudouin
Florian Veau, naturaliste LPO ©Joaline Baudouin

Concernant les gypaètes, la tâche s’avère un peu plus difficile. Le projet de réintroduction de ces oiseaux emblématiques a débuté en 1986 dans les Alpes, d’où il avait disparu depuis des décennies. Chaque année, deux à quatre jeunes de 3 mois sont déposés dans la région (Drôme), leur permettant une accoutumance au lieu qui les poussera à s’y installer durablement et à s’y reproduire lorsqu’ils atteindront l’âge de 8 ans, celui de leur maturité sexuelle. En plus de cette contrainte naturelle, un seul jeune par couple naît tous les ans ou tous les deux ans.

La réintroduction de cette espèce est rendue d’autant plus difficile qu’elle rencontre certains « aléas » dont fait partie le braconnage. En effet, il arrive que des éleveurs, mal informés et craintifs pour leur troupeau, tire sur un vautour passant à proximité. L’électrocution est aussi un facteur de mortalité important. Des travaux sont régulièrement programmés avec Enedis pour réduire cet impact. Les sports de plein air tel que le parapente et l’escalade dans des zones protégées constituent également une menace pour la tranquillité des vautours et notamment celle de leurs nichées. Malgré cela, un heureux évènement a marqué le projet LIFE Gyp’ACT en 2023 : la naissance d’un jeune gypaéton !

Observation en Basse-Ardèche ©Joaline Baudouin
Gypaète barbu en vol
Gypaète barbu ©Ollivier Daeye

Pour finir en beauté, nous nous sommes rendus sur une autre placette, principalement dédiée au Gypaète, non loin de là. Ce fut l’occasion d’apprécier un magnifique panorama avec vue sur le Vercors et les vallées ardéchoises. Un joli paysage agrémenté par les carcasses déposées par Florian que je vous laisse savourer ci-dessous ! 😉 

Placette d’équarrissage en basse Ardèche

C’est donc des vautours pleins les yeux et des connaissances pleins la tête que nous sommes finalement rentrées dans la Drôme.

Un grand merci à Florian pour ces moments hors du temps et très enrichissants, et la découverte de ces oiseaux fascinants !

                                                                                                                                                                                Joaline Baudouin :)

Avec la participation de Lisa Marc, Licia Oostdijk et Juliette Bouvier

Pour plus d’informations sur les vautours : Les quatre vautours – LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) – Agir pour la biodiversité