Le marquage et le comptage des azurés

Suite des épisodes 1, 2 et 3 (et fin)

Cette étape finale de l’étude a lieu en juin-juillet pour l’azuré du serpolet et en juillet-août pour celui de la sanguisorbe. Le noyau de l’étude étant la CMR (capture-marquage-recapture), il s’agit de l’étape cruciale qui fournira à nos deux stagiaires toutes les données nécessaires à un état des lieux de la présence de ces deux espèces dans leurs milieux de vie respectifs.

CMR Azurés de la sanguisorbe

Nos papillons cherchent à se nourrir, à se reproduire et à pondre durant les beaux jours. C’est à ce moment-là que Lucas et Antoine, armés de leurs filets, arpentent les parcelles soigneusement sélectionnées au moment des deux étapes précédentes de l’étude.

CMR de Lucas et Antoine ©Joaline Baudouin

Dans le cas des deux études, le procédé est de nouveau le même : à la vue d’un individu en vol, ils le capturent puis, s’il appartient bien à l’espèce recherchée, notent s’il s’agit d’un mâle ou d’une femelle puis le marquent, à l’aide d’un feutre indélébile, d’une lettre symbolisant la parcelle sur laquelle il a été trouvé et d’un numéro basé sur le nombre d’individus capturés sur cette même parcelle, qui augmente donc au fur et à mesure des captures.

Les photos ci-dessous illustrent le marquage de cet azuré du serpolet, le 5e capturé sur la parcelle Z.

Marquage d’un Azuré du Serpolet ©Joaline Baudouin
Azuré du Serpolet ©Joaline Baudouin

Ce numéro noté sur la face inférieure des ailes du papillon permettra lors d’une possible recapture de définir sa durée de vie minimum et s’il y a des échanges d’individus entre les colonies, c’est-à-dire si des individus passent d’une parcelle à une autre.

C’est ainsi que la capture permet une évaluation du nombre d’individus présents sur une parcelle et donc un état des lieux du nombre d’azurés. Le marquage, lui, permet de reconnaître un individu lors de la recapture qui, elle-même, est un moyen fiable de définir une moyenne de durée de vie d’un individu. Cette dernière a d’ailleurs pu être calculée à 3,5 jours, l’individu le plus vieux ayant été un azuré du serpolet capturé après 17 jours !

Pendant leur courte durée de vie sous leur ultime stade ailé, les azurés du serpolet et de la sanguisorbe chercheront à se reproduire et à pondre coûte que coûte sur leur plante hôte. Cependant, divers facteurs menacent cette étape pourtant cruciale au maintien des populations dans nos régions… Le réchauffement climatique retardant les facteurs météorologiques nécessaire à la période de vol en est un, mais l’agriculture et notamment le moment de fauche des prairies, où l’on relève une forte présence de sanguisorbe ou d’origan, est une menace non négligeable puisque, sans plante de ponte, le papillon n’aura nulle part où déposer ses oeufs et assurer la survie de l’espèce.

Azuré de la sanguisorbe ©Joaline Baudouin

C’est malheureusement ce qu’il s’est passé cette année pour l’Azuré de la sanguisorbe, espèce déjà fortement en déclin : les fortes périodes de pluie ont retardé les fauches des parcelles humides. Ainsi, la sanguisorbe n’a pas eu le temps de repousser pour être en fleur vers la fin-juillet. La parcelle la plus favorable lors de l’étude 2019, sur laquelle avait été relevé le plus grand nombre de phengaris teleius, en faisait partie… Un constat alarmant pour l’espèce qui, en France, n’a des populations en nombre suffisant pour être non-préoccupant, qu’en Alsace et en Lorraine…

Val de Drôme ©Joaline Baudouin

Cependant il est encore possible de sauvegarder ces deux papillons magnifiques dans nos régions en mettant en place des protocoles de sauvegarde et en sensibilisant les agricultrices et agriculteurs afin de trouver un juste milieu entre leur activité et la biodiversité !

Un immense merci à Lucas et Antoine, à leur patience et à leur passion pour les « pap’s » dont j’ai pu m’enrichir durant ces quelques mois ! Une passion très communicative, il faut bien l’admettre… 😉

Joaline Baudouin